Oui, les Algériens avaient le droit, et même le devoir, d’être libres, de former une communauté indépendante, égale aux autres, qui disposerait de son nom propre, et se faire reconnaître comme telle -et nous devions, en conséquence, les soutenir.
Mais, d’autre part, leur lutte n’avait aucune chance d’aboutir au genre de démocratie que nous croyions juste. On pouvait au contraire anticiper sans mal qu’elle produirait une nouvelle société de classe, à direction militaire.

Raymond Depardon
Pourquoi, dès lors, encourager la venue au pouvoir de nouveaux exploiteurs? Aucune situation aujourd’hui, aussi critique soit-elle à la périphérie des pays riches, ne menace l’état des choses, n’annonce la révolution. Le mot sonne creux. On ne peut pas analyser les événements d’Algérie à partir de cette perspective. Du moins ce pays reste pour quelques-uns, dont je suis, un objet de transfert ou, si l’on veut, d’amour. Le souci que procure la grâce de la beauté jointe à la disgrâce du sort peut guider l’analyse, sait-on, aussi bien que l’engagement politique.