
Je
ne crains pas trop pour ce livre les effets de la distance des temps,
des lieux et des langues. Car il ne raconte pas simplement l’histoire
d’une classe ouvrière d’un autre âge en un lieu éloigné. Il raconte une
forme d’expérience qui n’est pas si loin de la nôtre.
Les formes actuelles du capitalisme, l’éclatement du marché du
travail, la précarisation des emplois et la destruction des systèmes de
solidarité sociale créent des formes de vie plus proches de celles des
artisans européens du début du 19éme siècle que de l’univers de
travailleurs high-tech et de petite bourgeoisie mondialisée
livrés à une consommation frénétique, décrit par tant de sociologues et
de philosophes aujourd’hui. Dans ce monde aussi la question est de
subvertir l’ordre du temps qu’impose la domination.
Préface de la traduction en hindi de La Nuit des prolétaires
Hugo Pratt